Retrouvez ci-dessous quelques morceaux choisis de l’intervention de Dominique Strauss-Kahn,
Directeur général du Fonds monétaire
international Forum du développement humain à Agadir,le 1er novembre 2010
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Dominique Strauss Kahn : C’est pour moi un grand plaisir d’être avec vous aujourd’hui pour parler des
deux questions primordiales que sont le développement humain et la répartition des richesses. Je crois en effet que des inégalités trop prononcées nuisent au bien-être économique et à la
stabilité de l’économie.
Cette relation est trop souvent négligée, mais elle n’a rien de nouveau.
Adam Smith — l’un des fondateurs de la science économique moderne — avait clairement conscience qu’une mauvaise
répartition des richesses pouvait saper le système du marché libre.
N’a-t-il pas dit : « Cette disposition à admirer, et presque à vénérer, les riches et les puissants, ainsi qu’à …
négliger les personnes pauvres et d’humble condition … est la cause la plus grande et la plus universelle de la corruption de nos sentiments moraux »?
Il disait cela il y a 250 ans. Dans le monde d’aujourd’hui, ces problèmes sont amplifiés par le prisme de la
mondialisation…..
…Avant de parler de nouveaux modèles de croissance, il faudrait d’abord remédier aux anciens problèmes,
en particulier dans le secteur financier. Le secteur financier a été l’épicentre de la crise. Il faut renoncer à la culture du risque et de l’irresponsabilité pour remettre les banques au
service de l’économie réelle. Des progrès considérables ont déjà été réalisés dans ce sens, mais il y a encore beaucoup à faire
Dans l’immédiat, il est impératif de terrasser le fléau du chômage. La crise a fait perdre leur emploi à plus de 30
millions de personnes et, au cours de la décennie à venir, plus de 400 millions de jeunes arriveront sur le marché du travail. Une chose est donc claire : la croissance ne suffit pas; il faut une
croissance qui crée des emplois. Et la simple création d’emplois ne suffit pas; il faut que ce soient des emplois convenables, afin que tout le monde puisse bénéficier de la marée
montante.
Il ne faut pas oublier non plus le coût humain du chômage. Il entraîne une perte de revenu qui est à la fois
considérable et prolongée, surtout pour les jeunes.
Quand vous perdez votre emploi, vous risquez davantage d’avoir des problèmes de santé et même de vivre moins
longtemps.
Quand vous perdez votre emploi, les résultats scolaires de vos enfants ont plus tendance à se dégrader.
Quand vous perdez votre emploi, vous êtes moins enclin à avoir confiance dans les institutions publiques et la
démocratie….
…Les politiques fiscales et de dépenses peuvent promouvoir l’équité et la stabilité économique. Il est indispensable
de mettre en place des dispositifs adéquats de protection sociale, notamment une indemnisation convenable du chômage. Dans ce domaine, le FMI travaille en étroite collaboration avec l’OIT sur le
concept d’une protection sociale minimale pour les personnes qui vivent dans la pauvreté ou la précarité. Dans nos programmes de prêt, nous insistons toujours sur la protection des plus pauvres
et des plus vulnérables au moyen de dispositifs solides de protection sociale. L’imposition progressive peut aussi promouvoir l’équité par le biais de la redistribution; c’est là une chose à
encourager….
Conclusion
Je voudrais maintenant conclure en quelques mots. Avant de nous quitter cet été, l’historien britannique Tony Judt a
lancé un appel passionné aux décideurs pour qu’ils s’intéressent beaucoup plus aux effets de l’inégalité. «L’inégalité a un effet corrosif, disait-il. Elle pourrit les sociétés de l’intérieur…
Elle illustre et amplifie la perte de cohésion sociale… c’est la pathologie de notre époque et la plus grande menace pour la santé de toute démocratie.»
Le FMI a pour mission de veiller à la stabilité économique et financière, qui est le fondement avéré du développement
humain. Nous nous soucions de l’égalité non seulement par simple respect de la personne humaine, mais aussi parce que l’inégalité menace cette stabilité.
Le FMI a été fondé à la suite de la Grande dépression et de la Seconde Guerre mondiale pour promouvoir de meilleures
relations entre les pays, empêcher les dérives nationalistes et éviter les conflits d’origine économique. Pour y parvenir, nous avons besoin de l’ouverture que nous a apportée la mondialisation,
mais nous avons aussi besoin d’une croissance mondiale qui soit équitable et stable. Nous avons besoin d’une nouvelle mondialisation.
La dernière grande période de mondialisation — dans les décennies qui ont précédé la Première Guerre mondiale — était
riche de promesses, mais elle s’est terminée en désastre par trente ans de guerre épouvantable et de dévastation économique. Cela s’est déjà produit une fois et pourrait se produire à nouveau. La
crise récente nous a rappelés à la réalité. Nous avons évité une deuxième Grande dépression et nous avons appris beaucoup de choses. Mais il nous reste encore beaucoup de chemin à
parcourir.
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